LONG DISTANCE CALL
Horya Makhlouf J’exile / Me-xile, The Eyes Publishing cur. Sabyl Ghoussoub 2024 (FR/EN) link ⤷
 ©Prune Phi.jpg)
Long distance call (2018) ©Prune Phi
"Une collection de photographies de dents blanches, de sourires étincelants à la ligne parfaite, validées par un pouce en l'air, est mise à mal par l'une d'entre elle, malheureuse dentition imparfaite, rayée d'un chemin de métal censée lui apprendre à filer droit. Ailleurs, un nuage de torses nus, bien huilés, bodybuildés, canoniques à l'excès, est contrebalancé par les images de pneus et jantes de voiture en noir et blanc qui s'y mêlent. Les associations visuelles que s'amuse à proposer Prune Phi sont cocasses, apparemment absurdes, dans un premier temps seulement. Derrière le sourire parfait et les nerfs saillants de muscles prêts à exploser, se devine une urgence. Celle que les gros bouts de scotch qui relient chacun des éléments à son ensemble trahissent le besoin de saisir, vite, ce qui se cache derrière la façade, ce que l'on veut bien montrer, ce qu'il faut désirer. À côté d'un burger délicieusement publicitaire, la photographie d'un couple pixellisé dont les visages anonymes et brouillés n'ont que faire.
Dans les mariages visuels de Prune Phi se lit le désir de comprendre ce qui relie l'individu à la norme, à la société qui l'entoure, aux modèles qu'elle lui impose, et aux histoires qu'elle laisse dans ses marges. Morcelée, sa famille a quitté le Vietnam pour la France d'un côté, les Etats-Unis de l'autre. Morcelée, son identité balance entre ce que ses parents lui ont raconté, ce qu'elle devine, ce qui a été modifié outre-Atlantique et qu'elle a voulu rencontrer. Voyage après voyage, sur la côte ouest américaine et à travers le Vietnam, elle est partie confronter, récupérer, recomposer, les morceaux éclatés de son histoire familiale. Ses assemblages sont nés de la nécessité de comprendre ce qui relie les individus à cette même famille, à une même terre, à une même histoire, et comment tout cela peut tenir ensemble avec de gros bouts de scotch agencés par l'urgence."
A collection of photos showing gleaming white teeth, perfect smiles approved with a thumbs-up, is disrupted by a single outlier: one unfortunate, imperfect set of teeth, scarred by a strip of metal meant to teach it to grow straight. Elsewhere, a cloud of oiled, bare-chested, overly sculpted bodies—excessively canonical—is interrupted by black-and-white images of car tires and rims woven into the mix. The visual pairings Prune Phi plays with seem whimsical, even absurd—at first. But behind the perfect smile and bulging muscles on the verge of bursting lies a sense of urgency. The thick strips of tape connecting each element to the whole betray the need to quickly grasp what lies behind the surface—what we're allowed to see, what we're told to desire. Next to a deliciously commercial-looking burger, there’s a pixelated photograph of a couple, their blurred, anonymous faces indifferent to the gaze.
In Prune Phi’s visual juxtapositions runs a desire to understand what binds the individual to norms, to the society around them, to the models it imposes, and to the stories that linger in its margins. Fragmented, her family split—some left Vietnam for France, others for the United States. Fragmented, her identity wavers between what her parents told her, what she senses, and what was transformed across the Atlantic—what she later set out to meet. Journey after journey, along the American West Coast and through Vietnam, she has sought to confront, retrieve, and reassemble the scattered pieces of her family story. Her collages were born from the urgency to understand what ties people to the same family, the same land, the same history—and how it might all hold together with thick strips of tape, arranged in haste.
